La civilisation la plus réputée pour avoir porté des perruques est l’Égypte. Parce qu’elle a pour fonction de protéger du soleil et de la vermine, la perruque est un élément constitutif du vêtement égyptien tant masculin que féminin. Les perruques à l’époque sont courtes, au niveau de la nuque, placées sur le crâne souvent rasé (Cléopâtre avait le crane rasé) et on les maintient avec de la cire d’abeille. Être perruquier est alors tout un art. La perruque est généralement faite de cheveux naturels, les formes et les styles variant au gré de la mode : on a retrouvé dans certaines tombes antiques des perruques frisées au volume et à la coupe impressionnants.

A Rome également, le cheveu est important, et la coiffure, tout comme le vêtement, indique le statut social. Caligula est chauve, et porte des perruques pour être respecté par son peuple. Les perruques sont aussi portées par les femmes comme ornement. Elles sont faites de cheveux naturels, noirs venant d’esclaves d’Orient, ou blonds d’esclaves d’Allemagne ou nordiques.
Après la chute de l’empire romain, l’utilisation de cet accessoire disparaît totalement des habitudes de l’Europe occidentale pendant un millénaire. Durant le moyen âge, la perruque est interdite par l’église catholique qui y voit un artifice qui s’interpose entre l’homme et Dieu.
La mode est remise au goût du jour au XVIe siècle comme un moyen de compenser la perte de cheveux ou de perfectionner son apparence personnelle. Les perruques ont aussi des emplois fonctionnels : Le manque d’hygiène de l’époque implique des infections capillaires, risque qui peut s’amoindrir si les cheveux sont rasés et remplacés par une perruque qui peut être aisément retirée.
À cette époque, la façon dont l’on s’habille et se coiffe est principalement dictée par la cour. Élisabeth I, fille d’Henri VIII, va répandre la mode de la perruque rousse au sein de la cour anglaise dans les années 1560.

En France, c’est Louis XIII, atteint de calvitie, qui donne cours à la mode masculine de la perruque aux alentours de 1620. Il porte une perruque « à fenêtres » laissant passer quelques mèches de vrais cheveux. Ainsi, progressivement, les perruques deviennent un accessoire obligatoire de l’habillement pour les personnes d’un certain rang social. A tel point que les fabricants de perruques gagnent un prestige énorme. Les perruques deviennent tellement longues et lourdes (elles demandent parfois 80h de travail, et peuvent peser jusqu’à 1kg) qu’on se fait raser la tête pour pouvoir les supporter. La demande est si forte que deux cents perruquiers travaillent pour la cour. La corporation des perruquiers est créée en France en 1665, puis c’est le cas partout en Europe.
Mais c’est pendant le règne de Louis XIV, chauve à 19 ans, que la perruque masculine s’impose. C’est la mode du « style Louis XIV », fait de grandes boucles qui tombent sur les épaules. Le souverain a plus de 40 perruquiers qui dessinent ses perruques dans la cour de Versailles. Bientôt l’aristocratie européenne adopte ce type de coiffe, plébiscité par l’avènement du protestantisme, qui prône le « bien paraître », et la bonne hygiène.

La mode pour les femmes à cette époque est moins extravagante. On l’appelle le style « Fontange ». Son nom a été créé par la Duchesse de Fontange, qui lors d’une journée de chasse avec Louis XIV, s’est pris la chevelure dans la branche d’un arbre, et pour réarranger le cheveu l’a empilé sur sa tête. Le roi est resté fasciné par cette coiffure accidentelle, et la priée de toujours la conserver. Ce style reste à la mode jusqu’en 1720.

Quand le siècle se termine, la tendance est reversée : les femmes se mettent à leur tour à porter des perruques exubérantes, de 50 à 80 cm de hauteur, couvrant le dos et les épaules. Elles sont popularisées par Marie-Antoinette, et par son coiffeur perruquier Léonard, qui leur donne le nom de « pouf ». Coté couleur, c’est pastel (rose, violet clair ou gris bleuâtre) pour les femmes, blanc pour les hommes. La beauté et la complexité de la perruque indiquent encore une fois le rang social de celle qui la porte. Sans surprise, les perruques sont lourdes et inconfortables à porter. On est même obligé de surélever les cadres des portes pour que ces dames puissent passer, tellement leurs perruques sont imposantes. Ces perruques sont particulièrement onéreuses à produire, les exemplaires les plus remarquables étant fabriqués à base de véritables cheveux humains ; le crin de cheval était quant à lui utilisé comme une alternative à meilleur marché.

Vers la moitié du XVIIIème siècle sous la Régence, le nouveau roi de France Louis XV impose un style de perruques plus petites et poudrées pour les hommes. Les militaires nouent leur perruque dans le cou, le plus bas possible, à l’aide d’un ruban très serré. La mode du catogan s’étend à la bourgeoisie et à la noblesse. Les familles ont un salon dédié à la « toilette », où elles se poudrent quotidiennement avec de la poudre de riz ou un mélange d’amidon, de bois vermoulu et d’os desséché que l’on parfume. Des corps de métier entiers « s’emperruquent », le postiche devenant un des éléments du costume ou de l’uniforme (elles sont toujours portées aujourd’hui par les hommes de loi en audience dans certains pays du Common Law, surtout en Angleterre) : soldats, avocats, médecins…; le clergé adopte quant à lui la perruque à plaque avec tonsure.

Leur usage est très répandu dans toute l’Europe occidentale et en Amérique du Nord. En 1789, on recense jusqu’à 972 perruquiers à Paris. La Révolution française met un coup d’arrêt à cette pratique. Symbole de l’aristocratie et de la grande bourgeoisie, la perruque se perd, par crainte de perdre la tête. À partir de là, les coiffures sont plus classiques et plus simples, et on recommence à utiliser le cheveu naturel.
Après un bref sursaut durant le Directoire, il faudra attendre la seconde moitié du XXème siècle pour que les perruquiers français retrouvent réellement du travail. Grace au développement des fibres synthétiques qui permettent d’imiter les cheveux humains à moindre prix, les perruques connaissent un sursaut de popularité, et deviennent ce qu’elles sont restées aujourd’hui : un accessoire de mode ou de déguisement.
